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mercredi 16 février 2011

Jour 157 - 17/11/10

J’ai commis ma première erreur hier. A moins que ce ne soit avant-hier ? Difficile à dire.
J’en ai encore le vif souvenir mais la sensation d’échec a déjà disparu.
Une imperfection négligeable. Réparée dans l’instant. Sans haine ni courroux.
Une péripétie éphémère.
Perçant la surface calme des flots seulement pour y replonger sans tumulte aussitôt sa respiration prise.

Il y a quelques jours seulement, j’en aurais sans doute fait toute une histoire.
Ne prétendais-je pas que mon armure était déjà faite ? Avant même qu’elle ne prenne forme !
J’aurais été contraint de m’interroger sur la possibilité de balbutier un discours déjà prononcé.
Mais après quelques minutes de doute, j’aurais choisi d’y voir une épreuve de ma volonté, une confirmation de ma détermination, et me serais remis à l’ouvrage.
J’aurais alors écrit ce soir mon récit héroïque, le cœur empli de sérénité, rassuré par ma triomphante victoire.
Ma foi, l’enthousiasme et le panache m’ont toujours semblé être d’irréfutables qualités !

Mais l’évènement est en réalité passé grandement inaperçu.
J’avais déjà à moitié corrigé ma faute lorsque je pris conscience de l’avoir faite.
J’ai peut-être hésité une seconde avant de reprendre ma respiration, et l’incident était clos.

J’ai poursuivi mon labeur quotidien.
Celui-ci achevé, j’ai constaté qu’il était encore tôt dans l’après-midi et ai disposé en face d’une fenêtre donnant sur l’ouest un fauteuil au creux duquel je me suis affalé, baignant dans la lumière aveuglante et froide du soleil hivernal.
Une radieuse enveloppe qui m’engourdit à tel point qu’il me fallut, je crois, une bonne heure pour enfin donner aux pensées qui me préoccupaient une forme intelligible.

J’ai décidé qu’il allait bientôt me falloir hiberner.
J’en ai soupé de cette notion de nécessité omniprésente en société. D’autant qu’elle s’attache à tout ce qui, précisément, n'est pas nécessaire.
Trois choses me sont absolument vitales en tant qu’être humain : manger, bouger et dormir.
Voilà le cocon que je dois tisser.
Ce ne doit être qu’une étape dans mon développement, mais ce retour aux sources m’apparait très clairement essentiel.
Pour purger tout ce fatras d’absurdités qui nous plombe sans cesse.

Arrivé à ce stade de réflexion, je me suis souvenu très clairement de ce livre de Robert Silverberg dont la thèse principale était que le propre de l’être humain est de construire … pas de reconstruire.

Partir de zéro et avancer.
Ce « propre de l’être humain » assurément est assez proche de ma « sauvagerie sophistiquée ».

Paradoxalement, il semble que de nos jours, ce « zéro » soit déjà à part entière un objectif à atteindre.
Ce sera donc mon premier pas.

P.S. Je consigne ici des images de l'armure afin de pouvoir mesurer plus tard mes avancées.


   


lundi 14 février 2011

Jour 150 - 10/11/10

L’armure avance à son rythme.
Les étapes ont commencé à perdre de leur singularité. Le dessin, le travail de pochoir, la découpe, la peinture. Tout se confond peu à peu dans mon esprit pour ne plus former qu’une notion générale de « travail ».
Au sens noble du terme.
Je fais quelque chose. C’est une sensation durable et bonne.

Pendant mon temps libre, je dévore une œuvre que je viens de découvrir.
Elle parle des rêves, et de comment chacun les aborde tout au long de sa vie.
C’est un régal !
Je suis d’un tempérament si traditionnel, si casanier … je change si rarement mes habitudes que j’oublie toujours à quel point le contact de la nouveauté me bouleverse.

Quelle place ont mes rêves dans tout ce que je fais ?

Cette armure en est-elle seulement un ?
Je ne crois pas. J’ai désiré la faire, et je l’ai faite.
Littéralement, Amaterasu est un caprice. Un caprice vaguement virtuose, à la rigueur.
Mais pas mieux.

Si je ferme les yeux un instant et invoque à ma conscience le rêve, j’obtiens ceci.

1.       « Force »
2.       Sous une forme quasi-bestiale, je bondis de toits en toits à une vitesse surhumaine, les tuiles éclatent en mille morceaux sous la pression de mes foulées, l’air s’embrase autour de moi
3.       « Harmonie »

A la lumière de ces aspirations, ces armures, photos et textes dont je prétends vouloir faire ma vie m’apparaissent bien bourgeois.
Des choix en demi-teintes inventés au fil du processus éducatif censé faire de moi un membre de notre société.
Des activités bourgeoises, oui. 
Domestiques.
Et d’une façon certaine, empruntées.

Ce à quoi j’aspire n’est-il pas simplement la sauvagerie ?

Mais puisqu’il semble impensable de se défaire de son humanité, peut-être devrais-je viser une sauvagerie sophistiquée.

Voyons.
Par où commencer ?

P.S. Je consigne ici des images de l'armure afin de pouvoir mesurer plus tard mes avancées.